jeudi 3 juillet 2008

Objet

(A) Sens courants du mot.
(a) Par opposition à une idée, un objet est une chose concrète perceptible par les sens. Mais cette définition reste très relative. On ne peut éviter le solipsisme si l'on cherche un critère unique et formel entre objet, mirage et hallucination. D'ailleurs les autres sens du mot 'objet' en font vite un thème ou une idée.
(b) Dans une discussion, une association, une thèse, une recherche, une organisation réelle, l'objet est le but, la matière ou le domaine de l'activité.
(c) La locution 'sans objet' signifie que la chose est 'sans fondement réel'. Un procès, une action en justice (pour meurtre) peut devenir sans objet si le prétendu 'mort' ou 'disparu' se manifeste au cours du procès.
(d) Sur le Cédérom Encyclopédique (http://houdoy.hubert.free.fr/cdencycl.html) vous trouverez les définitions et les textes : Chosisme. Contrainte.
(B) En sémiotique.
(a) L'objet de connaissance doit être distingué de l'objet affectif (en Psychologie) et de l'objet psychique (en Psychanalyse).
(b) Citation :
- "On désigne du nom d'objet, dans le cadre de la réflexion épistémologique, ce qui est pensé ou perçu en tant que distinct de l'acte de penser (ou de percevoir) et du sujet qui le pense (ou le perçoit). Cette définition (qui n'en est pas une) suffit pour dire que seule la relation entre le sujet connaissant et l'objet de connaissance les fonde comme existants et distincts l'un de l'autre : attitude qui semble tout à fait conforme à l'approche structurale de la sémiotique. C'est dans ce sens qu'on parle de langage-objet ou de grandeur sémiotique, en insistant sur l'absence de toute détermination préalable de l'objet, autre que sa relation avec le sujet... L'objet (ou objet de valeur) se définit alors comme le lieu d'investissement des valeurs (ou des déterminations) avec lesquelles le sujet est conjoint ou disjoint. (Greimas, Courtès, p. 259)".
(c) Sur le Cédérom Encyclopédique (http://houdoy.hubert.free.fr/cdencycl.html) vous trouverez les définitions et les textes : Objet total. Objet partiel. Pulsion. Amour. Choix d'objet.
(C) En Dialectique.
(a) La dialectique du sujet et de l'objet est plus importante et permanente que l'identité de chacun d'eux.
- "L'homme se découvre quand il se mesure avec l'objet. (Antoine de Saint-Exupéry, (1900-1944), "Terre des hommes")".
(b) Même sans être particulièrement fétichiste, peu ou prou, nous projetons l'amour pour les sujets dans les objets qu'ils possèdent ou qui les évoquent.
- "Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ?
(Alphonse de Lamartine, (1790-1869), "Harmonies poétiques et religieuses", "Milly ou la Terre natale")".
(c) Car le sujet lui-même est un objet affectif. Il est élu par un choix d'objet, pour une relation d'objet.
(d) La distinction entre objet et sujet ne sera jamais stable. Elle est perpétuellement mouvante. Dans un véritable dialogue, les positions s'échangent à tout instant. C'est encore plus vrai dans le sadisme et le masochisme.
- "Rien de ce qui nous entoure ne nous est objet, tout nous est sujet. (André Breton, (1896-1966), Le Surréalisme et la Peinture)".
(D) En Trialectique.
(a) La trialectique reconnaît le sujet, l'objet et le projet.
(b) Citations :
- "Dans la pensée scientifique, la méditation de l'objet par le sujet prend toujours la forme du projet. (Gaston Bachelard, 1884-1962, "Le Nouvel Esprit scientifique")".
- "Ce qui nous garantit l'objectivité du monde dans lequel nous vivons, c'est que ce monde nous est commun avec d'autres êtres pensants. (Henri Poincaré)".
(c) "L'agir communicationnel" (Jurgen Habermas) entre les êtres pensants qui cherchent à mettre en commun ce vécu est à la base du projet d'intelligibilité de la science.
(c) Sur le Cédérom Encyclopédique (http://houdoy.hubert.free.fr/cdencycl.html) vous trouverez les définitions et les textes : Fonder. Fondement. Conjonction. Disjonction. Objet permanent. "Robinson Crusoé".
(E) Terme de Psychanalyse.
(a) En Psychanalyse, depuis l'usage qu'en a fait Freud, avec l'expression 'choix d'objet', le terme 'objet' désigne le plus souvent un sujet. Cette personne humaine est envisagée comme objet de l'amour (ambivalent) ou des pulsions (libidinales ou agressives) de la personne considérée. On parlera donc d'un choix d'objet narcissique (ressemblant à ego) ou d'un choix d'objet anaclitique (complément indispensable pour supporter ego et le prémunir de l'angoisse).
(b) N'en profitez pas pour déclarer à la personne que vous aimez : "Tu es ma chose !".
(c) Apports de Melanie Klein. L'enfant ne parvient pas tout de suite à percevoir l'unité de sa mère comme objet total. Au stade oral, il n'en connaît d'abord qu'un objet partiel, le sein. Celui-ci est tantôt perçu comme un bon objet, gratifiant, miraculant, tout puissant ; tantôt, quand il se fait attendre dans l'angoisse primaire, le sein est perçu comme un mauvais objet, cruel, terrifiant, désorganisateur. C'est à partir de la position dépressive que le nourrisson découvre que le bon objet et le mauvais objet sont un seul et même objet total, la mère. Il se sent alors coupable de son agressivité.
- "L'objet naît dans la haine, dit Freud, c'est l'absence réelle, voire hallucinée de l'objet premier qui incite le petit de l'homme à se poser – inconsciemment – des questions («haineuses») sur sa maman, voire sur son sein. C'est le grand mérite de Melanie Klein de nous avoir décrit le monde fantasmatique de l'infans autour de cette première découverte «haineuse» de l'objet, les défenses spécifiques qui peuvent en découler, et aussi cette tendance de vouloir panser l'objet dès que l'infans commence à le penser. (Susann Heenen-Wolff, "Psychanalyse et Liberté", document du web)".
(d) A partir de la découverte des fantasmes et de la vie fantasmatique (proche du délire pathologique ou du rêve normal), Sigmund Freud et les psychanalystes ont été amenés à compléter la réalité externe (ou réalité indépendante) par une réalité psychique. Il s'ensuit une outre distinction entre objet interne et objet externe. A la mort d'un objet externe (individu proche d'ego), le travail de deuil se déroule principalement avec et sur l'objet interne correspondant.
(e) Cette distinction des objets interne et externe se retrouve entre les deux grandes structures de la personnalité de base :
- chez un psychotique, l'objet interne est gravement atteint ;
- chez un névrotique, l'objet externe reste intact.
(f) Dans la lignée limite-dépressive, les états limites oscillent entre deux systèmes adaptatifs. Faisant le plus souvent référence à la réalité concrète des objets externes, ils passent parfois brutalement à des références fantasmatiques aux objets internes (incorporés ou projetés).
(g) Ambivalence des attentions. L'objet de la bonté ou de la séduction n'est plus un sujet en analyse (certaines psychothérapies déviantes) ou en formation (crime pédophile en institution d'éducation). Il est devenu un "objet" au sens courant du terme.
(h) Sur le Cédérom Encyclopédique (http://houdoy.hubert.free.fr/cdencycl.html) vous trouverez les définitions et les textes : Envie et gratitude. Théorie du traumatisme. Etiologie paternelle.
(F) Mystère.
(a) Malgré notre besoin de rationalisation, nous ne comprenons pas tout ! Il existe des objets ou des phénomènes visuels ou des perceptions non-expliquées.
- Un OVNI est "la perception rapportée d'un objet ou d'une lueur vu dans le ciel ou sur le sol, dont l'apparence, la trajectoire, et le comportement dynamique et luminescent général n'évoquent pas une explication logique ou conventionnelle et qui mystifie non seulement le témoin original, mais reste non-identifié après une étude poussée de toute l'évidence disponible par des personnes techniquement qualifiées pour identifier une source probable, s'il y a lieu. (Docteur J. Allen Hynek)".
(b) Sur le Cédérom Encyclopédique (http://houdoy.hubert.free.fr/cdencycl.html) vous trouverez les définitions et les textes : Soucoupe volante. Ufologie. Modèle d'intelligibilité.
(G) Epistémologie.
(a) Depuis la physique quantique, la coupure radicale entre sujet observant et objet observé n'est plus de mise.
(b) Pourtant, la formule 'tout se passe comme si' est souvent oubliée, même quand elle est employée.
- "Mais pratiquement, aucun autre scientifique, dans les disciplines de la science macroscopique, n'a transposé ces considérations aux descriptions du monde auxquelles ils se livrent dans leur discipline. C'est notamment le cas en physique des particules ou en cosmologie, qui sont pourtant très imbibées de physique quantique. On parle du boson de Higgs ou du multivers comme s'il s'agissait de choses existant en dehors de l'homme et de ses systèmes de connaissance. Finalement, et c'est plus grave, la société laisse toujours la parole aux autoritarismes de toutes sortes, qui prétendent s'appuyer sur leur connaissance prétendue de ce qu'est le monde en soi pour nous dicter nos croyances et nos comportements - je ne parle pas seulement des tenants des religions dites révélées, mais des experts de toutes origines, se disant scientifiques, qui s'expriment constamment dans les médias, et influencent les gouvernements. (Jean-Paul Baquiast, dialogue avec Michel Bitbol, à propos de "Des phénomènes de Kant à la théorie quantique de l'information. Le rôle de la philosophie des sciences", in "Automates Intelligents", http://www.automatesintelligents.com/interviews/2004/juil/bitbol.html)".

Aucun commentaire: